Le régalien, grand vainqueur du budget 2025

Dans son budget 2025, le gouvernement Bayrou a demandé des efforts à tous les ministères… sauf aux portefeuilles régaliens, qui bénéficient même d’une augmentation de leurs crédits.

« L’effort de 50 milliards d’euros porte majoritairement sur la baisse des dépenses de fonctionnement de l’Etat. Nous diminuons de 2 % les crédits ministériels : c’est l’effort le plus important depuis vingt-cinq ans », s’est félicitée la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, après l’adoption définitive du budget 2025 par un recours au 49.3.

Ce qui semble être une victoire pour l’exécutif ressemble donc à une lourde défaite pour tous les ministères qui auront moins de moyens pour mettre en œuvre les politiques publiques.

Pour tous les ministères ? Pas vraiment, certains s’en sortent même plutôt bien : les missions régaliennes (Défense, Sécurité, Justice) ont réussi à ne pas participer à l’effort budgétaire. Au contraire, leurs crédits ont augmenté par rapport à ceux fixés dans le budget 2024. Quand la Défense dispose de 3,25 milliards d’euros supplémentaires, la mission « Travail et emploi », principale victime du budget Bayrou, en perd 3,97 milliards.

Bien que la baisse des primes à l’embauche des apprentis fasse consensus, la réduction drastique des emplois aidés, les coupes dans l’insertion par l’activité économique (dispositif de soutien aux chômeurs de longue durée) ou encore la diminution de l’enveloppe dédiée à la formation des chômeurs sont critiquées, particulièrement alors qu’une remontée du chômage s’annonce.

Coup de rabot généralisé… sauf pour le régalien

Evolution des dépenses de l’Etat par principale mission entre 2024 et 2025, en milliards d’euros (hors dépenses de retraite des fonctionnaires)

L’enveloppe « Cohésion des territoires », transverse à plusieurs ministères et qui permet, entre autres, de financer le soutien au logement social, l’APL (aide personnalisée au logement) et la rénovation énergétique des logements, est réduite de près d’un demi-milliard. Et ce, alors que la Fondation pour le logement des défavorisés (ex-Fondation Abbé-Pierre) regrettait déjà, dans son rapport annuel sur le mal-logement paru il y a quelques jours, une réduction conséquente de l’ambition de la politique du logement en 2024.

La suppression de 4 000 postes d’enseignants a été évitée de justesse, mais cela n’a pas empêché le gouvernement de réduire le budget éducatif de 43 millions d’euros

Dans l’Education, la suppression de 4 000 postes d’enseignants a été évitée de justesse. Cela n’a toutefois pas empêché le gouvernement Bayrou de réduire le budget éducatif de 43 millions d’euros. Mais ce n’est qu’un coup de canif en comparaison de la coupe à la hache que subit le budget de la Recherche et de l’Enseignement supérieur, qui perd, lui, 727 millions d’euros.

Et encore tous ces chiffres, fournis par Bercy, ne prennent pas en compte l’augmentation des prix qui rend la potion encore plus amère pour certains budgets.

Coup de rabot généralisé… sauf pour le régalien

Evolution des dépenses de l’Etat par principale mission entre 2024 et 2025, en milliards d’euros (hors dépenses de retraite des fonctionnaires)

Hormis le régalien, les outre-mer bénéficient aussi d’une légère hausse de crédits pour 2025 (+ 174 millions d’euros), sur fond de mobilisation contre la vie chère en Martiniqued’effondrement de l’économie en Nouvelle-Calédonie suite aux émeutes et d’importants besoins pour la reconstruction à Mayotte après le passage du cyclone Chido.

Ecologie : une hausse qui cache des baisses

L’enveloppe « Ecologie, développement et mobilités durables » semble également être sortie gagnante des arbitrages entre le gouvernement, la droite et le Parti socialiste (PS). Cette victoire apparente n’est pourtant qu’un trompe-l’œil, bien utile pour la communication de l’exécutif.

En réalité, la hausse de ces crédits est essentiellement due à l’augmentation des compensations versées aux fournisseurs d’énergies renouvelables, en raison de la baisse des prix du marché. Ce mécanisme prévoit que l’Etat comble l’écart entre le prix de marché de l’électricité et un tarif déterminé à l’avance pour assurer un certain niveau de rémunération aux fournisseurs d’énergies renouvelables. En excluant ce dispositif, le budget Ecologie est en baisse.

Le budget de l’Ademe est amputé de 300 millions d’euros et les fonds pour le verdissement du parc automobile perdent un milliard

Sans oublier que les fonds dédiés à la transition écologie sont répartis dans d’autres enveloppes qui subissent également des coupes. Le budget de l’Agence de la transition écologique (Ademe) est par exemple réduit de 300 millions d’euros et les fonds pour le verdissement du parc automobile baissent d’un milliard d’euros, pour ne citer que ces exemples.

Ecologie, recherche, logement, formation… les investissements pour l’avenir sont donc sacrifiés. Une stratégie vouée d’avance à l’échec selon de nombreux experts, dont l’économiste Philipp Heimberger, qui l’expliquait récemment dans nos colonnes.

Source : https://www.alternatives-economiques.fr/regalien-grand-vainqueur-budget-2025/00114066?utm_source=emailing&utm_medium=email&utm_content=18022025&utm_campaign=quotidienne