Tout comprendre à l’éventuelle suspension de la réforme des retraites en trois minutes
Afin d’éviter une dissolution de l’Assemblée, le camp du socle commun remet dans la balance une éventuelle suspension de la réforme des retraites. Quels seraient les impacts pour les futurs pensionnés et les comptes publics ?
L’actualité. Quand une ex-Première ministre, celle-là même qui a fait adopter la réforme des retraites à 64 ans par 49.3, se déclare favorable à sa suspension, on peut mesurer à quel point ce recul de l’âge légal continue de jouer un rôle capital dans la vie politique française. Cette éventuelle mise sur pause, avancée par Elisabeth Borne aujourd’hui ministre démissionnaire de l’Education nationale, suffirait-elle à obtenir un accord de non-censure d’une partie de la gauche et éviter une dissolution de l’Assemblée nationale ?
A l’issue de sa rencontre ce mercredi 8 octobre avec Sébastien Lecornu, éphémère Premier ministre lui-même démissionnaire, Olivier Faure, le patron des socialistes, affirme n’avoir obtenu « aucune assurance » sur la suspension de la réforme retraite. Tous les conditionnels sont de rigueur, mais s’il devait advenir, que signifierait un gel des compteurs dès aujourd’hui ?
Les enjeux. La réforme des retraites qui a repoussé l’âge légal de 62 à 64 ans se déroule progressivement, à raison de quelques trimestres supplémentaires par an, sur une période de huit ans. Entrée en vigueur en septembre 2023, elle a commencé à toucher la génération des personnes nées après mai 1961 et doit s’achever en 2032 avec la génération née en 1968. Parallèlement, et on l’oublie souvent tant l’accent est mis sur l’âge, la durée de cotisation nécessaire pour obtenir une pension à taux plein (sans décote) a elle aussi été accélérée. La réforme Touraine l’avait fixée à 172 trimestres (ou 43 annuités) pour la génération 1973. Cet horizon doit être atteint plus tôt, dès la génération 1965.
L’arrêt de la réforme en cours, dès aujourd’hui, se traduirait par un gel du curseur de l’âge légal de départ à 62,75 ans et celui de la durée de cotisation à 42,5 ans. Pour le budget 2026, l’incidence pour les finances publiques devrait en tout cas être minime car l’essentiel des économies attendues par le passage de 63 à 64 ans ne se fera réellement sentir qu’à partir de 2028.
« En 2026, à partir d’octobre plus précisément, le coût d’un gel à 62 ans et 9 mois devrait se chiffrer à moins d’un milliard, calcule l’économiste Michaël Zemmour. En 2032, la facture (âge et durée de cotisation) devrait représenter 8 milliards d’euros pour le régime des retraites. Cela équivaut à une hausse d’un point de cotisation pour compenser. »
Le coût d’un recul de 64 à 63 ans atteindrait 5,8 milliards d’euros en 2035, avait estimé de son côté la Cour des comptes (qui n’avait pas pris en considération le paramètre de la durée de cotisation). A terme, si l’on considère que de nombreux actifs partis plus tôt paieront moins de cotisations et d’impôts, la facture pour l’ensemble des finances publiques se gonflerait à 13 milliards d’euros à cet horizon, selon l’institution.
Enjeu du budget 2026, les 64 ans sont surtout devenus un objet politique. Ses opposants savent néanmoins qu’une suspension ne serait que le prélude à de nouvelles discussions dès 2027, année de la présidentielle, sur son financement mais aussi sur les enjeux de pénibilité et d’inégalités entre les différents assurés.